Bioéthique, Acte II
par le P. François Marxer
Il y a peu, soirée avec une équipe de couples jeunes, foncièrement, délibérément, affirmativement catholiques. Tant mieux. La conversation en vient vite à rouler sur les questions de bioéthique. Focalisation rapide sur les techniques qui assistent ou accompagnent les débuts de la vie des vivants. Et comme, au milieu de nous, une pharmacienne était au fait de tous les produits mis à disposition sur le marché, on ne parla bientôt plus que de la compatibilité de ces techniques avec l’« enseignement de l’Église », codifié, et, me semblait-il, intraitable au point d’en être en péril de se calcifier. À la fois, j’admirais la fermeté du propos, mais je ne pouvais pas ne pas interroger (voire m’inquiéter de) cette sévère rigueur qui méconnaissait la sage et subtile diversité des écoles de théologie morale, cette unanimité de nuances, fleuron de la pensée catholique en notre modernité. Pour revenir aux essentiels fondamentaux, profitez des pages de Débats éthiques, sagesse biblique, un livre d’Anne-Marie Pelletier, bibliste reconnue, experte en littérature (et paroissienne de Rueil !), publié chez Salvator : vous en aurez une bonne présentation dans l’émission L’Esprit des Lettres du 27 avril dernier.
Avec la clôture des consultations engagées à travers le pays en vue de la révision des lois de bioéthique, vient de se refermer l’Acte I de ce débat qui nous intéresse tous prodigieusement et qui n’est pas clos (le sera-t-il jamais d’ailleurs ?), car il engage l’avenir et de nous-mêmes et des générations qui nous succéderont. Certes, il est des questions brûlantes que réactive (complaisamment ?) l’actualité journalistique sur la procréation et la gestation, en négligeant quelque peu la question de la filiation et donc des relations qui donnent place aux personnes humaines dans la société des hommes et la continuité des générations. Sans parler de cet acte primordial qu’est de mourir, qui encombre les individus pressés et productifs et au sujet duquel nous avons perdu beaucoup du savoir-faire que possédaient nos aïeux.
En revanche, je m’interroge sur les ambitions (si prometteuses, nous dit-on) du séquençage du génome humain et de son analyse qui permettrait de prédire l’avenir de nos santés, délivré de la menace de maladies pour le moins inopportunes. Je soupçonne le retour du mythe (ou du fantasme) d’une race pure, assurée de n’engendrer que des êtres réputés parfaits et irréprochables.
Dans la procession de communion, je vois venir la petite fille qu’affecte une trisomie 21 ; elle vient les mains jointes et je dépose sur ses lèvres le pain de sacramentelle Présence, qu’elle dévore plus encore qu’elle ne le reçoit. J’ai alors tellement envie de m’agenouiller devant elle, pur tabernacle qu’elle est, de la pure et réelle Présence. Et derrière elle, sa mère vigilante, comme un conopée de piété et de tendresse absolue.